Avec la crise Covid-19, le consommateur a soudain pris conscience qu’une alimentation variée, en suffisance, de qualité et à un prix abordable chaque jour de la semaine, du mois et de l’année est loin d’être une évidence. Le caractère vital du maintien en activité des différents acteurs du système alimentaire, de la fourche à la fourchette, a, dès le départ, été reconnu. Tout a été mis en œuvre pour continuer à fournir la nourriture nécessaire aux 11 millions de citoyens belges, y compris aux plus démunis, pour lesquels des actions spécifiques ont été prises. Un mois après le début des mesures de confinement, nous pouvons conclure que le système alimentaire belge et européen permet de répondre à une situation de crise extrême. Dans le même temps, la crise met encore plus en évidence la nécessaire évolution vers un système alimentaire plus durable.
En Wallonie, tous les éléments sont là pour agir. En mai 2018 déjà, après un large processus participatif, des représentants de l’ensemble des parties prenantes du système alimentaire wallon ont développé ensemble une vision commune et partagée d’un système alimentaire durable pour la Wallonie. Ce processus a impliqué entre autres des fédérations professionnelles, associations expertes dans les différentes dimensions de l’alimentation, pouvoirs publics régionaux et locaux, acteurs de l’action sociale, de l’éducation et de la formation, du développement territorial et syndicats. Ces acteurs ont également identifié une centaine de leviers d’actions pour fédérer et accélérer la transition vers un tel système. Tout cela a été matérialisé dans un référentiel « Vers un système alimentaire durable en Wallonie »[i].
Le référentiel wallon doit guider notre transition vers un système plus durable. Pour générer une véritable mobilisation collective, seule garantie de succès, tous les acteurs, qu’ils soient publics ou privés, devraient œuvrer dans le même sens, de manière coordonnée et efficiente. Aujourd’hui, en Wallonie, de nombreuses initiatives existent déjà, qu’il s’agisse du Green Deal cantines durables, de la démarche D’Avenir, d’initiatives locales, … . Elles sont malheureusement trop dispersées, pas toujours cohérentes entre elles, ce qui limite leur efficacité.
Une vision commune existe, elle se trouve dans le référentiel. Les idées et les moyens ne manquent pas non plus. Tous les éléments sont sur la table pour faire évoluer véritablement le système vers plus de durabilité. Ce qu’il manque, c’est la volonté commune et coordonnée de mettre les moyens disponibles au service de la vision équilibrée, formulée dans le référentiel, et qui prend en compte les aspects environnementaux, sociaux et économiques de l’alimentation.
Un plan d’action concret doit maintenant voir le jour. Il doit être porté par l’ensemble du gouvernement wallon, parce qu’il concerne plusieurs compétences liées à différents ministres, et s’appuyer sur le référentiel wallon déjà développé. Il doit aussi impliquer tous les acteurs concernés pour ne pas évoluer vers un système dichotomique où l’on opposerait deux stratégies, l’une exclusivement locale avec l’autre plus ouverte sur l’extérieur.
Ce plan doit dès lors intégrer tant les besoins locaux que la dimension européenne et internationale de l’alimentation. Il se doit par ailleurs d’inclure la dimension de durabilité dans toutes les composantes des échanges, quelle que soit la longueur de la chaîne. Il faut ainsi renforcer et développer des filières d’avenir porteuses et créatrices de valeur ajoutée à partager équitablement entre tous les acteurs de la chaîne. Plus concrètement, pensons notamment aux filières des pois protéagineux, de l’épeautre, des oléagineux, des productions maraîchères et fruitières et des productions animales de qualité. Des filières créatrices d’emploi local mais répondant aux besoins, parfois nouveaux, des consommateurs, ici, mais aussi ailleurs en Europe et dans le monde.
Le caractère ouvert du système contribue indéniablement à sa résilience. Mais un système ouvert ne doit pas non plus signifier un système sans règles. Par ailleurs, qui dit dimension internationale, dit aussi coopération Nord-Sud et, ce que nous demandons pour nous, nous le réclamons aussi pour nos partenaires et collègues dans d’autres parties du monde.
Définir ensemble ces règles et construire ensemble un système plus durable doit faire de chacun d’entre nous les #FoodHeroes de demain.
- Anne Reul, Fevia Wallonie
- Guy Paternoster, Raffinerie Tirlemontoise
- Jacques Crahay, Cosucra
- Olivier de Wasseige, UWE
- Marianne Streel, FWA
- Charles Petit, Comeos Wallonie
- Katrien D’hooghe, BFA
- François Héroufosse, Wagralim
- Arnaud Deplae, UCM
- Marianne Sindic, Professeur Gembloux Agro-Bio Tech
- Antoine Clinquart, Professeur ULiège
- Bernard Bodson, Professeur Gembloux Agro-Bio Tech
- Yvan Larondelle, Professeur UCLouvain
- Luc Chefneux, membre de l’Académie royale de Belgique
- Geneviève Dupont-Ligny, UAW
- Guy De Mol, Moulins de Statte
- Fabienne Bister, Consultante PME