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- Bart et Aurélie : « C’est en collaborant que nous faisons la différence, en tant que fédération »
Début octobre, Bart Buysse a soufflé ses cinq bougies en tant que CEO de Fevia, tandis qu’Aurélie Gerth achevait son tout premier mois en tant que directrice de la communication. L’occasion idéale de les convier à une discussion à cœur ouvert sur notre industrie alimentaire belge. Nous revenons ensemble sur les 5 dernières années et nous tournons vers l'avenir du secteur le plus savoureux.
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Bart, tu es à la tête de Fevia depuis le 1er octobre 2018. Quelles évolutions as-tu observées au cours des cinq dernières années ?
Bart : « L'industrie alimentaire est le plus grand secteur industriel du pays, tandis que Fevia est une fédération de taille moyenne. Malgré des années difficiles, nous avons réussi à poursuivre notre croissance : le nombre de nos entreprises membres s’approche du cap de 750, nous avons fait monter à bord la fédération sectorielle Vinum Et Spiritus, passant ainsi de 26 à 27 secteurs, et l'équipe Fevia a suivi le mouvement.
Le secteur s’est également développé. En dépit des crises successives, le chiffre d'affaires, pour la période 2018 à 2022, est passé de 52 à 76 milliards d'euros. Il ne s'agit pas d'une croissance pure : l’effet prix, en raison des indexations salariales et des hausses de coûts, joue également un rôle. L'emploi a fortement progressé : de 93 000 en 2018 à plus de 100 000 emplois en 2022. La digitalisation et la création d'emplois vont de pair dans notre secteur. Et les exportations continuent d'être notre moteur de croissance. Nous restons le plus grand secteur industriel, investisseur et employeur du pays. Nous pouvons en être fiers !
Sur le fond, le contexte général n'a pas connu de changement significatif depuis 2018. Sur le plan politique, l'accent a été mis principalement sur la gestion de crise, laissant moins de place à une véritable politique. Les thématiques restent les mêmes, mais le nombre de dossiers et leur complexité ont considérablement augmenté. De plus, la durabilité fait l'objet d'une plus grande attention, avec un tsunami d'initiatives politiques. Toutefois, nous constatons dans ce domaine un manque de cohérence politique à différents niveaux - européen, fédéral et régional - ce qui complique considérablement notre travail. Enfin, la communication a encore gagné en importance. Il est de notre responsabilité de faire connaître le secteur, de suivre toutes les évolutions et d’engager le dialogue. Sans communication, on n'existe pas et on n'a pas d'impact sur la politique. C'est aussi simple que cela. »
Quelles sont les réalisations dont tu es fier ?
Bart : « Ces dernières années, nous avons évolué dans notre rôle en tant que fédération. Cette évolution est le résultat de la vision stratégique, « lead, care, grow », que nous avons élaborée en 2018. Nous voulons faire figure de précurseurs, donner une orientation et contribuer à prendre soin à la fois de notre secteur et de nos entreprises, ainsi que de la société et du consommateur, afin de créer du progrès pour tous. Cette vision, nous l’avons par la suite traduite avec nos membres dans notre roadmap de développement durable « Que mangerons-nous demain ? », qui est aujourd'hui une boussole pour l'ensemble du secteur.
Nous devons donner une image positive de notre industrie alimentaire : un grand secteur avec de nombreux défis, qui, au sens propre comme au figuré, « donne à manger » à des millions de familles, un secteur qui bouge, qui innove et investit beaucoup, qui prend ses responsabilités et qui, avant tout, propose des produits délicieux. Nous sommes trop modestes. C'est pourquoi j'ai commencé à utiliser systématiquement les expressions « le secteur le plus savoureux » et « le plus grand secteur industriel », et je suis heureux que beaucoup de gens les reprennent.
(Avec fierté) Et lorsque des membres, à l'occasion de nos réunions annuelles, viennent nous dire qu'en tant que fédération, nous donnons une belle image du secteur et que nous contribuons à propager et à faire rayonner la fierté et le dynamisme des gens du secteur, c'est pour moi le plus grand compliment que l'on puisse recevoir. »
Qu’est-ce qui te plaît le plus dans ton travail ?
Bart : « L’équipe Fevia ! Je travaille avec une équipe très solide, des experts de haut niveau sur lesquels on peut s'appuyer. Notre équipe a un ADN unique, avec des caractères tous différents, mais nous nous retrouvons dans notre fierté, notre détermination et nos particularités. Nous aimons faire les choses à notre manière et nous ne nous contentons pas de faire comme les autres. C'est comme cela que nous faisons la différence. Ensemble, nous avons réalisé énormément de choses ces cinq dernières années. J'en suis extrêmement fier.
Et bien sûr, le secteur est un atout considérable : grâce à la multitude et à la diversité des entreprises, petites et grandes, nous pouvons, par la voix de la fédération, vraiment apporter quelque chose à nos membres. C’est un secteur proche des gens et de la société, qui doit donc relever de nombreux défis et assumer de nombreuses responsabilités.
Nous sommes proches des entreprises et avons de bons contacts personnels avec de nombreux acteurs du secteur et le monde politique. J'ai un travail très varié, où je sais comment la journée commence, mais pas comment elle se termine. Et quoi que vous fassiez, quelle que soit la fonction que vous occupiez, on en revient toujours à l’aspect humain : convaincre les gens, les faire adhérer à votre histoire, les épauler... c'est notre fil conducteur et c'est ce qui rend le travail passionnant. »
Quelle est l’anecdote qui t’a marqué ?
Bart : « Je suis particulièrement fier de ce que nous avons accompli lors des crises successives : la crise Covid, la guerre en Ukraine et la crise de l'énergie et des coûts qui a suivi. Je fais ici référence à notre rôle vis-à-vis du secteur, de la chaîne, des instances politiques et des médias, avec notamment une reconnaissance rapide en tant que secteur essentiel, le premier protocole sur la sécurité au travail, notre plan de soutien et de relance, notre campagne dédiée à nos « Food Heroes », et la dérogation temporaire pour travailler avec des alternatives à l'huile de tournesol.
Sans oublier la pénurie temporaire de gel hydroalcoolique. Un certain nombre de brasseurs et de distillateurs disposaient d'un surplus d’alcool à la suite de la fermeture de l’horeca et de l’arrêt des exportations. Cet alcool tombait à point pour fabriquer du gel hydroalcoolique. Certains étaient même prêts à reconvertir leur production pour en fabriquer. Le seul problème était les accises auxquelles était soumis l'alcool destiné à la consommation. En l'espace d'un weekend, nous avons directement réglé le problème avec Philippe de Backer, qui dirigeait la taskforce fédérale pour les équipements de protection, ainsi qu'avec l'administration fiscale. C'est ainsi que nous avons pu fournir en peu de temps un million de litres de gel hydroalcoolique supplémentaire. Nous avons pour ce faire collaboré avec plusieurs organisations. Un bel exemple de coopération public-privé. C’est de cette manière qu'on fait la différence. »
À ton tour, Aurélie. Tu es la toute nouvelle directrice de la communication chez Fevia. Quelles étaient tes attentes lorsque tu as commencé ?
Aurélie : « Je m’attendais naturellement à un travail très varié. On est en contact avec tellement de fédérations sectorielles différentes, pas moins de 27, et j’avais vraiment hâte d’apprendre à mieux les connaître. Je connaissais déjà Ann Nachtergaele et Johan Hallaert du temps où je travaillais chez Unilever et Coca-Cola, je savais donc qu'ils étaient des experts de premier plan dans leur domaine, et je m'attendais à apprendre beaucoup d'eux. C’étaient mes principales attentes : apprendre beaucoup, élargir mes connaissances et avoir une fonction très variée. »
Comment as-tu vécu ton premier mois ? Est-il à la hauteur de tes attentes ?
Aurélie : (Convaincue) « Oui, tout à fait. En un mois, j'ai déjà appris énormément de choses ... »
Bart : « ... et fait énormément de choses ! »
Aurélie : « ... Cela vaut la peine de vérifier. J'ai déjà visité un grand nombre d’entreprises, où j'ai pu être un témoin direct de leur passion pour la qualité, l'innovation, la durabilité et l'esprit d'entreprise. Je suis sincèrement ravie de cette fonction dynamique. On se trouve au carrefour de ce que font les entreprises, tout en étant proche de la politique, et je trouve cela tout à fait fascinant. Aborder chaque jour des thématiques importantes pour la société et travailler sur des dossiers qui sont se retrouvent dans l’actualité, c’est vraiment passionnant.
Ce qui me frappe, c’est le grand nombre de femmes qui travaillent chez Fevia. Un comité de direction composé presqu’exclusivement de femmes et d’un seul homme. C’est l'inverse de ce que j'ai connu jusqu’à présent (rire). Mais comment dire ? « The future is female ». De plus, ce n’est que maintenant que je réalise le nombre d’événements importants que Fevia organise et combien ils permettent de tisser des liens. Surtout après la période du coronavirus, il est très agréable, en tant que fédération, de rassembler les gens.
Fevia s'investit énormément pour ses membres, et ce travail est apprécié. Je l’ai constaté à Anuga. C’était génial de pouvoir participer dès mon premier mois à un salon international d'une telle envergure. Des entreprises sont venues nous dire qu’elles apprécient beaucoup nos articles, que nous diffusons, entre autres, dans le Fevia Weekly et la Monthly Newsletter. »
Lire ici les 5 tendances repérées à Anuga pour l'alimentation de demain
Quelle est l'importance de la communication pour une fédération sectorielle comme Fevia ?
Aurélie : « Très grande. Pour avoir de l'impact, il faut communiquer. Je trouve que Fevia communique beaucoup et très bien. La communication ne se fait pas seulement vers l'extérieur, vers les journalistes et les décideurs politiques. La communication envers nos membres et nos parties prenantes est au moins aussi importante. Nous veillons vraiment à un échange de connaissances entre nos membres, nous les inspirons avec des best cases, articles, webinaires et événements. Je dis toujours : « trop d'information, tue l'information ». Tout l’art consiste donc à rendre gérable la multitude de communications, afin que nos messages arrivent à bon port. »
« Pour avoir de l'impact, il faut communiquer. »
- Aurélie Gerth
Cap sur le futur
Aurélie, à quoi veux-tu t’atteler à l’avenir ? Y a-t-il certains aspects de la communication sur lesquels tu souhaites mettre l’accent ?
Aurélie : « Je pense que nous pouvons évoluer sur le plan des outils que nous utilisons. Je crois beaucoup au pouvoir des médias sociaux, nous devons donc continuer à investir dans ce domaine et dans des formats tels que la vidéo. Toutes les analyses des experts en communication montrent que la vidéo occupe une place de plus en plus importante. La digitalisation a déjà pris un essor considérable. Je pense qu'il est très important de poursuivre sur cette voie, mais aussi de la contrebalancer en maintenant des contacts personnels. Pour cette raison, les événements restent essentiels pour justement favoriser ces contacts. »
Bart, quels sont les défis qui nous attendent dans les prochaines années ?
Bart : « Nous sommes face à de très grands défis. Tout d’abord, le champ de tension entre la digitalisation, l'innovation et la durabilité. Ce « triangle » comporte de nombreux défis, mais offre aussi de nombreuses opportunités : la digitalisation contribue à innover, mesurer, rechercher et concrétiser des solutions et offre des perspectives intéressantes en matière de durabilité, que nous devons d'ailleurs mettre en oeuvre dans l'ensemble de la chaîne agro-alimentaire. À cette fin, note roadmap de développement durable propose des lignes directrices.
Dans le même temps, je constate la tendance croissante consistant à mettre en évidence les efforts des entreprises en termes de durabilité, par le biais de données, d'audits, de certificats et de rapports. Cela s’ajoute à toutes les autres activités des entreprises. Les responsables politiques doivent en tenir compte. Pour les PME, en particulier, cela doit rester gérable.
Ensuite, le champ de tension entre la rentabilité, des prix abordables et la compétitivité. Rentabilité et prix abordables ne se limitent pas au marché local. Comme nous évoluons dans un contexte international, nous devons aussi tenir compte de notre compétitivité à ce niveau.
Nous devons chérir et préserver notre solide ancrage local. Nous avons une chaîne agroalimentaire belge forte, mais nous ne pouvons pas continuer à pousser les entreprises et les consommateurs au-delà des frontières, nous devons au contraire garantir de bonnes relations au sein de la chaîne. Nous éviterons ainsi à terme de devenir totalement dépendants des approvisionnements en provenance de l'étranger.
Par ailleurs, je connais peu de secteurs où l’on reçoit, mais aussi où l’on crée tant de place pour l’autorégulation, par exemple, en matière de sécurité alimentaire, de marketing envers les enfants et les jeunes et d’alimentation équilibrée. Cette autorégulation doit évoluer avec les tendances que nous observons. Sinon, nous nous retrouverons avec une législation qui ne nous permettra pas d'orienter et de répondre avec souplesse au changement.
Les exportations sont notre moteur de croissance. Elles permettent de poursuivre notre croissance, d'investir et de créer des emplois. Le fléchissement de la part de nos exportations résulte d'une baisse de la compétitivité et d'une série d'accords commerciaux importants en attente d'être ratifiés par nos gouvernements, qui disposent de plusieurs leviers à cet égard.
Pour terminer, 80 % de notre législation est d'origine européenne. À ce niveau, nos responsables politiques sont encore trop peu présents. Nous devons y faire entendre notre voix en étant plus unis.
Fevia a déjà concocté ses recettes. Je renvoie ici à notre mémorandum, avec un clin d'oeil sans équivoque à l'attention des femmes et hommes politiques : let’s spice up our politics! (rire) »
« L'avenir sera digital, durable et circulaire, également pour nos entreprises alimentaires. »
- Bart Buysse
À quoi ressemblera notre secteur dans cinq ans ?
Aurélie : « Future proof, si vous voulez mon avis. Les entreprises évoluent de plus en plus vers une industrie 4.0. Cette évolution est nécessaire afin de pouvoir, en tant qu’organisation, relever tous les défis qui se présentent, le plus efficacement possible. Et cela, dans un contexte de pression économique qui, selon moi, ne fera que s’accentuer. C’est une voie à deux sens : il faut pouvoir offrir beaucoup, mais parallèlement, les processus sous-jacents doivent, je pense, être aussi simples et efficaces que possible, avec un impact environnemental réduit au miminum. L’intelligence artificielle sera nécessaire pour rendre tout cela possible. »
Bart : « Je suis convaincu que notre industrie alimentaire belge continuera d’exister, mais nous devons garder notre ancrage ici. Nous avons notre qualité, diversité et savoir-faire et nous continuons à miser sur l'innovation et la durabilité. En tant que centre de l’Europe, nous sommes un marché test idéal du fait de l’enrichissement mutuel des civilisations et cultures. C'est ce qui rend notre industrie alimentaire unique et j'y crois fermement. L'avenir sera digital, durable et circulaire, également pour nos entreprises alimentaires, cela ne fait aucun doute. Dans ce contexte, Fevia souhaite être un guide et un partenaire constructif afin que nous puissions continuer à nous mettre autour de la table et apporter des solutions pour un avenir durable. »