Opinion : Concertation de la chaîne belge : oui, on peut faire autrement

01.03.2017

La chaîne agro-alimentaire belge se compose de maillons qui sont reliés entre eux de manière indissociable. La pression sur les prix fait partie de toute négociation commerciale entre ces maillons. Par contre, quand une partie abuse de sa position de force de fait pour exercer une pression supplémentaire sur ses fournisseurs, on tombe dans la zone grise de pratiques commerciales déloyales et parfois même de tensions sérieuses. Tandis qu’en Europe des voix s’élèvent pour répondre à ces tensions par le biais d’un cadre règlementaire et des sanctions, notre pays montre qu’on peut faire autrement : la Concertation de la chaîne belge offre à travers le dialogue plus de compréhension entre les partenaires de la chaîne et une meilleure protection des nombreuses entreprises alimentaires plus petites.

Nos entreprises alimentaires achètent leurs matières premières le plus souvent à des agriculteurs belges et les revendent ensuite, après transformation en produits de consommation en Belgique et à l’étranger, au client dans les supermarchés. Quand un ou plusieurs de ces maillons sont sous pression, par exemple en raison d’une augmentation du prix des matières premières, d’un coût salarial plus élevé ou de prix de consommation plus bas, cela a inévitablement des conséquences pour les autres maillons. Chacun souhaite une part égale du gâteau et lorsque celui-ci devient plus petit, cela peut engendrer des disputes autour de la table…

De la concurrence, il y en aura toujours et cela stimule l’innovation dans la chaîne alimentaire. C’est en soi une bonne chose, mais le maintien d’une pression sur les prix et les rapports de force parfois inégaux lors de négociations peuvent donner l’impression que les règles du jeu ne sont pas respectées. Une enquête européenne[1] a ainsi démontré il y a quelques années, que 96 % des entreprises alimentaires ont déjà eu à faire avec des pratiques commerciales déloyales. L’impact financier de telles pratiques commerciales déloyales sur les entreprises alimentaires, parmi lesquelles de nombreuses PME, peuvent en outre freiner les investissements et les innovations.

De telles discussions peuvent très rapidement s’aggraver, surtout quand les médias mettent de l’huile sur le feu ou lorsque les partenaires de la chaîne ne connaissent pas les motifs des uns et des autres. La Concertation de la chaîne belge rassemble depuis 2009, sur base volontaire, les différents maillons de la chaîne agroalimentaire belge, avec pour objectif le développement durable de la chaîne dans un cadre équilibré et stable. Cela s’est traduit concrètement en 2010 par un Code de bonne conduite pour des relations équitables entre fournisseurs et acheteurs dans la chaîne agroalimentaire. Un dialogue selon le principe « appliquer ou expliquer » constitue la base du Code de conduite belge.

En 2014, le Code de conduite belge a été, après quelques ajustements, interchangeable avec la European Supply Chain Initiative, ce qui est extrêmement important pour un secteur comme le nôtre orienté vers l’exportation. Même si le Code de conduite ne peut pas s’exprimer sur des stratégies de prix : il jette les bases de la manière dont les partenaires de la chaîne doivent négocier correctement et peut intervenir dans des différends. Dans le cas où plusieurs entreprises mentionnent en plus des infractions similaires et sérieuses, des « litiges agrégés », FEVIA demandera au comité de gouvernance de les analyser. Aujourd’hui, la Concertation de la chaîne traite de 3 à 4 litiges par an.

Le lancement du site www.supplychaininitiative.be en 2015, a permis aux entreprises de se joindre à la procédure de gestion des litiges et d’y accéder plus facilement. La législation et les sanctions constituent une entrave à cette approche volontaire, qui a d’ailleurs été récemment renforcée avec une précision de la procédure et un appel pour engager un président scientifique externe. Avec la Concertation de la chaîne et le Code de conduite belges, notre pays est précurseur au niveau européen. Cela prouve qu’un dialogue structurel peut rendre une législation superflue. Continuons à favoriser le dialogue et à travailler ensemble, afin que tout le monde puisse bénéficier d’une part égale du gâteau.