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- 10 pistes de réflexion issues d’un dialogue sur les pertes alimentaires
Comment éviter les pertes alimentaires du champ à l'assiette ? Tel était le thème de la cinquième table-ronde organisée par Fevia en mai dans le cadre de sa roadmap de développement durable. Nous avions rendez-vous chez Unilever à Bruxelles, où une trentaine de représentants de la chaîne alimentaire, des autorités, des instituts de recherche et des ONG ont dialogué sur le sujet. Nous avons distillé dix pistes de réflexion.
1. Rendons les pertes alimentaires tangibles
Plusieurs phénomènes sont la cause des. Pensonsà des betteraves rouges par exemple qui ne répondent pas aux exigences d'achat et qui finissent sur le tas de compost de l'agriculteur. Ou aux produits qui s'écartent légèrement des exigences d'achat et finissent comme nourriture pour animaux (à cause par exemple d’une durée de conservation limitée).
En concrétisant mieux l’impact des conditions contractuelles sur les pertes alimentaires, cela permet de mieux comprendre les causes et de mettre en place une stratégie pour chercher des solutions ensemble. Il faut donc rendre les pertes tangibles et l'exprimer en euros, en camions ou en palettes.
2. Elaborer des solutions ensemble
Faire correspondre l'offre et la demande, créer des solutions de stockage et de distribution flexibles, déployer le transport frigorifique, regrouper les flux pour une redistribution plus efficace, traiter les excédents ... Toutes ces mesures peuvent augmenter la faisabilité et la rentabilité de la lutte contre les pertes alimentaires. Collaborer est essentiel.
Dans un contexte B2B, il est utile de mieux comprendre les process de son fournisseur et de son client. Cela permet une meilleure compréhension et de dégager des solutions : quelles décisions peuvent influencer les pertes alimentaires et quand ces décisions sont-elles prises ? Quelle est la planification des semis de l'agriculteur et celle de la production chez le transformateur de produits alimentaires ? Quand le supermarché détermine-t-il ses promotions et comment transmettre la bonne information à la bonne personne au bon moment ? Grâce aux réponses à ces questions, le fournisseur et le client peuvent se coordonner, ce qui permet de réduire les pertes alimentaires.
Les structures soutenues par les autorités peuvent faciliter le marché et la mise en relation. Les fédérations d'entreprises peuvent également jouer un rôle facilitateur important. Enfin, des systèmes de subsides peuvent contribuer à donner du temps et de l'espace à tous les maillons de la chaîne alimentaire afin qu'ils puissent élaborer des solutions en collaboration avec des partenaires.
3. Revaloriser les aliments et les connaissances alimentaires
Revalorisez les aliments en améliorant les connaissances à leur sujet. Le gaspillage est plus courant lorsque quelque chose est perçu comme bon marché ou sans valeur. Des enfants de l'école primaire aux adultes chez eux ou au travail, des autorités aux entreprises, tout le monde bénéficie d'une meilleure connaissance :
- la chaîne de valeur alimentaire,
- des impacts et conséquences des décisions prises dans un maillon de la chaîne sur l'ensemble de la chaîne,
- de la chaîne du froid et d'autres facteurs déterminants de la sécurité alimentaire,
- des possibilités de transformation pour réduire les pertes alimentaires.
Comprendre les nombreux efforts, les acteurs et le process permet de revaloriser les aliments et de réduire le gaspillage. Voulons-nous encourager des changements de comportement à long terme ? Alors, nous devons également aborder le problème sous l'angle environnemental, de développement durable ou économique.
4. Mettre en adéquation les exigences de qualité, les attentes et les solutions
Où les exigences de qualité peuvent-elles être assouplies pour réduire les pertes alimentaires sans compromettre la sécurité alimentaire ? Où la communication peut-elle aider à utiliser davantage de flux ? Comment développer des canaux de vente adaptés pour chaque type de qualité ?
Trop souvent, des exigences de qualité trop élevées entraînent des pertes alimentaires. Des concombres tordus, des courgettes qui ne rentrent pas dans l'emballage, des baguettes trop courtes... Réfléchissons ensemble aux assouplissements possibles (B2B, exigences de qualité des clients), ou à la manière de développer des offres complémentaires pour différents clients en répondant à une plus grande diversité de types et d'attentes en matière de qualité.
Cela peut se faire en développant plus de possibilités d'utilisation pour les flux qui ne répondent pas aux exigences de qualité les plus strictes, plus de possibilités de traitement...
5. Définir les pertes alimentaires et harmoniser les objectifs
Le terme « pertes alimentaires » peut revêtir différentes connotations. chaque institution utilise sa propre définition, parfois complétée par des interprétations sur ce qui constitue ou non une perte alimentaire. C’est dès lors difficile de mesurer et de suivre les évolutions. Il faut également une bonne compréhension des définitions pour savoir ce qu’on peut faire avec un flux.
En outre, dans la pratique, il s’avère que parfois les données rassemblées sous-estiment les pertes alimentaires et que les diminutions ne sont pas toujours perceptibles. Pour les entreprises alimentaires, cela signifie : savoir exactement de quoi il s'agit, connaître ses propres process et savoir où des pertes ont lieu.
Un point d'attention supplémentaire est de bien définir quel est le problème et y associer un objectif. Lorsque l’on considère uniquement les pertes alimentaires, « l'échelle de Moerman » offre une boussole claire. Les pertes alimentaires sont étroitement liées à la lutte contre le changement climatique. Lorsque l’on prend en compte également les objectifs climatiques, il apparaît que les choix en matière d’utilisation ou de transformation diffèrent parfois de ce que prescrit « l'échelle de Moerman ».
6. Affiner et partager des pistes de réflexion afin d’intervenir avec plus de flexibilité
Les entreprises alimentaires individuelles font déjà beaucoup pour lutter contre les pertes alimentaires. En effet, les matières premières ont un coût et les pertes sont évitées autant que possible pour des raisons économiques. Les entreprises misent également déjà sur l'intelligence artificielle pour optimiser leurs processus de production.
Mais chaque gaspillage alimentaire est spécifique, a son propre contexte et donc sa propre solution potentielle. Il peut être utile de disposer d'une base de donnée accessible et partagée expliquant comment les pertes alimentaires peuvent se produire. Partager des « best practices » peut également aider à trouver des solutions pour des cas spécifiques.
Le changement climatique rendra également la production primaire plus variable, ce qui rendra d'autant plus pertinente l'intégration d'une plus grande flexibilité dans la chaîne alimentaire. Cela offre également la possibilité d'identifier plus facilement les possibilités de montée en puissance pour certaines solutions.
7. Offrir de nouvelles incitations fiscales
Dans le secteur alimentaire très compétitif, il n'est pas toujours évident de concilier les réalités économiques (tels que maximiser la productivité et l'efficacité, développer des nouvelles activités ou miser sur la croissance) avec des projets et des process visant à réduire les pertes alimentaires ou à rencontrer d'autres objectifs de développement durable.
La chaîne alimentaire est très compétitive et repose sur l'efficacité, tandis que l'utilisation des pertes alimentaires dans une entreprise exige de la flexibilité, en raison des variations de l'offre en termes de volumes et de nature. Cela rend l'utilisation des pertes alimentaires non rentable.
Les incitations fiscales telles que les déductions fiscales pour les dons, les subsides et/ou l'emploi social avec un ancrage structurel peuvent rendre les projets et les process visant à réduire les pertes alimentaires plus attrayants sur le plan économique.
8. Informer clairement le consommateur
Des pertes importantes continuent à se produire chez le consommateur à domicile. Deux tiers des consommateurs ne connaissent pas la différence entre « à utiliser jusqu'au » et « à consommer de préférence avant le », ce qui favorise le gaspillage alimentaire. Des informations supplémentaires ou différentes sont nécessaires pour la différence soit bien comprise.
La campagne « Regardez, sentez, goûtez - avant de gaspiller » est un bon exemple. Ces campagnes doivent être associés à une éducation générale sur les règles de conservation, des informations sur les options de transformation (par exemple la congélation) et des lignes directives générales sur les risques de sécurité alimentaire (par exemple la viande par rapport au yaourt). Les autorités ont certainement un rôle à jouer en prenant des mesures de soutien supplémentaires.
9. Miser sur la capacité de transformation comme levier structurel
Les entreprises alimentaires ont besoin de stabilité, tandis que les excédents ou les pertes alimentaires sont souvent variables. Transformer les aliments (congélation, préparation de sauces ou de soupes, etc.) peut devenir un levier structurel important permettant de, réduire la variabilité.
Dans le cas d’ initiative individuelle et à petite échelle, il n'est pas toujours évident d'investir dans une cuisine ou installation de transformation. Des partenariats entre les initiatives de distribution sociale et les grandes cuisines existantes (supracommunales) ou avec des installations de transformation pourraient permettre d’atteindre une taille suffisante. Les partenariats avec des structures intercommunales, provinciales peuvent contribuer à étendre les initiatives au-delà des grands centres urbains.
Des objectifs tels que la réduction des pertes alimentaires et l'emploi social, combinés aux subventions thématiques ou aux ressources financières supplémentaires, peuvent également compenser la rentabilité plus limitée des projets.
10. Éliminer les obstacles législatifs
Une législation stricte met trop souvent des bâtons dans les roues des projets qui visent à lutter contre les pertes alimentaires. D'une part, le dialogue peut apporter des éclairages sur les conséquences indésirables de certaines législations et permettre un consensus pour des adaptations ciblées.
D'autre part, la législation peut également contribuer à trouver des solutions. Par exemple un récent assouplissement des régles permet désormais de congeler les produits un jour avant leur date de péremption.
Les règles de concurrence empêchent également les acteurs du marché de partager des informations sur les volumes et les contrats. Cela peut représenter un obstacle, par exemple pour mieux mettre en concordance la production et les ventes, en particulier dans un secteur très concurrentiel et lorsque des investissements importants sont nécessaires.